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Vive les hérissons et l'écriture!
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18 septembre 2008

Le jeu des titres : Sur liste rouge

Voici ma participation pour le titre suggéré (Sur liste rouge) pour le jeux des titres. Si vous voulez savoir de quoi il s'agit, aller voir le lien suivant http://lejeudestitres.canalblog.com/ .

J'ai changé de style un peu et pour une fois, mon texte entre dans un seul message! Faut dire aussi que j'étais un peu moins inspirée par ce titre... mais je vais me reprendre pour les prochaines fois!

SUR LISTE ROUGE

Enfin son avion amorçait l'atterissage. Après ces longues heures de vol, il avait bien hâte d'arriver. Il était parti de chez-lui tôt le matin, il avait dû prendre l'autobus pour se rendre à l'aéroport, il avait fait quelques heures de vol, puis il avait dû transférer et faire encore plusieurs heures de vol avant d'arriver à destination.

Alors que l'avion plongeait vers la terre ferme, il voyait le sol, les arbres et les bâtiments se rapprocher. C'était sa première visite au Québec. Chercheur imminent dans son domaine dans son pays, il avait été invité à participer à un congrès international sur le sujet au Québec.

Bien sûr, il était là pour le travail et étant un passionné du sujet traité, il tirerait de nombreux bénéfices de côtoyer des collègues venant de partout dans le monde et il apprécierait le fait d'être mis à jour sur les plus récentes découvertes. Il était un scientifique avant tout et cette opportunité professionnelle ne reviendrait probablement pas avant plusieurs années.

Mais il avait bien hâte aussi, durant les soirées libres qu'il aurait, de venir visiter cette région qu'il ne connaissait pas du tout. Il avait hâte de découvrir Montréal et ses visages cosmopolites. Il avait hâte de découvrir la ville de Québec avec son charme tout à fait européen. Il avait hâte de découvrir des paysages à couper le souffle et bien sûr, il ne voulait pas manquer l'occasion d'aller faire une croisière pour admirer les baleines. S'il avait eu assez de temps, il aurait bien aimé aussi en profiter pour aller voir les chutes Niagara et peut-être faire une petite excursion de l'autre côté de la frontière américaine. Le congrès ne durait qu'une semaine, mais il avait payé lui-même une semaine supplémentaire pour avoir le temps de visiter le plus d'endroits possibles.

Il était avide de découvrir la culture québécoise, de prendre des dizaines de photos et de ramener de nombreux souvenirs à sa famille à son retour.

Tandis que l'avion se posait et qu'il se levait pour prendre son sac de voyage dans le porte-bagages au-dessus de lui, il en profita machinalement pour se dégourdir les jambes, mais toute son attention était rivée par le hublot : il était enfin arrivé!

Ce n'était pas la première fois qu'il voyageait, son travail l'amenant à parcourir de nombreux pays. Mais il n'avait jamais mis le pied en Amérique, alors, être au Québec l'enthousiasmait énormément.

Il avait dû se prendre des semaines d'avance pour demander tous les papiers nécessaires. Non seulement ça lui prenait son passeport, mais il avait aussi dû demander un visa canadien. Il avait dû montrer de nombreuses preuves de résidence, fournir les preuves de son hébergement payé au Québec ainsi que les papiers officiels concernant le congrès.

Il avait été surpris par tant de mesures, ne disait-on pas que le Canada, tout comme la province de Québec, était très accueillant? Il s'était toutefois plié à toutes les demandes, sans poser de questions. Il ne voulait surtout pas embêter personne et les problèmes de paperasserie administrative se réglaient toujours plus rapidement en fournissant tout ce qui était demandé.

Il sortit de l'avion, trop heureux de pouvoir se promener un peu après ces longues heures d'inactivité, regardant partout. Il attendit près de 35 minutes pour avoir ses bagages au tourniquet et il se mit enfin en file pour franchir les douanes de l'aéroport.

Arrivant devant le douanier, tout souriant, il lui tendit son passeport ainsi que son visa.

- Vous voulez entrer au Canada pourquoi ?,  lui demanda le douanier d'un ton brusque en observant ses papiers.

- Je viens pour un congrès scientifique. J'y participe et j'y donne également une conférence dans deux jours. Voulez-vous voir les papiers?

- Combien de temps allez-vous rester ici ?, demanda de nouveau le douanier sans répondre à sa question.

- Je reste deux semaines, car je veux profiter pour faire un peu de tourisme.

- C'est long deux semaines pour un simple congrès. Qui me dit que vous n'essaieraez pas de vous éclipser et de demander l'asile ensuite?

- Oh non, pas du tout. Je viens seulement à titre de voyageur, j'ai même déjà mon billet de retour. Voulez-vous voir?

- Qu'avez-vous dans vos valises ?

- Des vêtements, des papiers pour ma conférence, des articles personnels. Pourquoi toutes ces questions?

- Pourquoi vous avez tant voyagé ?

Et l'interrogatoire continua ainsi pendant un long moment. Au début tout souriant, il commençait à être vaguement nerveux et à se demander s'il n'avait pas oublié quelque chose d'important. Il parlait très bien le français, mais peu l'anglais et comme le douanier s'entêtait à le questionner seulement en anglais, il se demandait s'il comprenait vraiment toutes les subtilités des questions posées.

Plus le douanier le questionnait et plus le ton se brusquait quelque peu. Il ne voulait pas perdre patience, mais cela faisait déjà deux fois qu'il montrait à ce douanier arrogant tous les papiers officiels, son invitation au congrès, sa preuve de paiement à l'hôtel... et pourtant, il ne semblait pas pressé de le laisser passer.

Quand le douanier lui demanda pour la énième fois s'il avait l'intention de rester plus longtemps que nécessaire, il s'emporta et perdit complètement patience. Il éleva le ton, se rapprochant de la vitre et demandant pourquoi on lui faisait subir tout ça.

Le douanier eut un grand sourire et lui expliqua que son pays d'origine, les Émirats arabes unis, était sur la liste rouge du Canada et tous les visiteurs devaient passer un long interrogatoire aux douanes pour s'assurer que le Canada ne ferait pas entrer de "terroristes" sur son territoire. Comme il venait de s'emporter et de crier pour une simple question, le douanier venait d'en déduire qu'il n'avait aucune preuve que ce visiteur était un bon citoyen honnête et qu'il n'était pas en fait un terroriste.

Le douanier estampa un gros "Rejected" sur les papiers et fit signe à la sécurité d'escorter cet homme jusqu'au bureau de sa compagnie aérienne pour qu'il puisse reprendre l'avion le plus tôt possible pour retourner d'où il venait.

Il essaya d'appeler l'ambassade de son pays, il voulut voir un avocat, mais tous ces efforts furent vains. Il resta à l'aéroport jusqu'en soirée, où un avion repartait vers son pays natal. La rage au coeur, l'humiliation de ce refus, la honte que son pays soit sur cette fameuse "liste rouge" et la colère d'être tombé sur un douanier aussi haineux attisèrent son mépris des Québécois, des Canadiens et des Nords-Américains en général.

En prenant le temps de regarder autours de lui, il vit qu'il n'avait pas été le seul dans cette situation, des dizaines d'autres personnes l'entouraient dans cette fameuse salle d'attente. Il en reconnut avec qui il avait voyagé pour l'aller, d'autres qu'il ne connaissait tout simplement pas. Tous avait cette même colère au fond du regard pour avoir été refusé dans un pays qu'on disait pourtant si ouvert. Apparemment, la fameuse liste rouge des pays considérés comme suspects par le Canada était bien longue...

Et si vous pensez que c'est exagéré, détrompez-vous, car ça arrive pourtant à tous les jours!

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Commentaires
Z
il y a des rouges qui se faufilent encore...<br /> <br /> On filtre, mais pas tant que ça.<br /> <br /> Pauvre type. Comme dans la vie, on paie pour les autres.<br /> <br /> Dans le cas de cette histoire, le titre était superflu, je trouve. C'est bien entendu fictif, car c'est bien loin d'être aussi filtré, mais ça évoluait tout seul... <br /> <br /> Zed
J
Très bien traité, ce titre, encore une fois!!!<br /> Bravo!
C
L'art de nous tenir en haleine jusqu'à la fin.<br /> Et cette fin est plutôt inattendue et triste à la fois.
M
Étant dans un milieu de travail avec des personnes de toutes les nationalités<br /> Étant dans un milieu de travail où je vois plein de gens surqualifiés par des diplomes non valides ici travaillant dans des conditions parfois très tristes<br /> Ayant entendu tellement d'histoires comme celle que tu nous racontes, je ne doute pas de la bétise humaine qu'on peut faire preuve!
Vive les hérissons et l'écriture!
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